La Reine du Sud

Roman – Arturo Pérez-Reverte – / Points éditeur / – 2002

Ce qu’on peut dire à propos de « La Reine du Sud »

A l’instar de Moby Dick, Léon l’Africain ou Salammbô, La Reine du Sud est un roman qui vous prend de force par la main. Il vous emporte. D’abord son style, simple, direct, percutant, limpide. Ensuite l’intrigue : immorale, tourbillonnante. Les rebondissements, la galerie de personnages, le travail en immersion de l’auteur pour faire vivre son histoire au travers des « corridos » (chansons populaires mexicaines). L’ensemble est d’une densité rarement atteinte. Bref vous l’aurez compris, c’est un roman qu’il est bien à lire !

Ce qu’on peut dire de l’histoire

Immoral ? Oui un peu, mais c’est ça qui est génial ! Teresa Mendoza est une petite mexicaine du Sinaloa, échangeuse de billets à la sauvette. Elle est maquée à un trafiquant local qui bien vite subit la loi du Milieu. Le « Cartel » de Sinaloa est une province du sud-ouest mexicain gangrénée par le trafic de stups, les règlements de compte et les fameux « corridos« , sorte de chansonnettes à la sauce piquante. La future reine du sud est bientôt contrainte et forcée de s’enfuir en Espagne. Enfin presque. Gibraltar. Autre plaque tournante des trafics en tout genre. Tant bien que mal, elle s’adapte. Prend ses marques.

Un roman sous influence… assumée

« La Reine » s’éveille à la littérature en prison et tombe amoureuse (comme l’écrivain), de Dumas et son Comte de Monte-Cristo. Trésor, évasion, amitié hors-norme, vengeance, ascension professionnelle. Petit à petit, malgré sa froideur et son antipathie, on s’attache à ce petit bout de femme impliquée dans un monde d’hommes. En effet, si l’immense majorité des hommes du roman sont des ordures corrompues, crapuleuses et violentes, Teresa possède une sorte de morale, un code d’honneur bien à elle. C’est d’ailleurs Pérez-Reverte qui le résume le mieux : « C’est une question de… symétrie !« . L’influence d’Edmond Dantès sans doute.

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Moby dick

Roman- Herman Melville – / Richard Bentley éditeur / – 1851


Qu’est-ce qu’on peut dire à propos de ce (très) gros livre et du concept Starbuck ?

Tout le monde connaît Moby Dick ! L’histoire d’une baleine, l’histoire d’une chasse extraordinaire etc. Les plus initiés d’entre vous auront fait le rapprochement entre les magasins Starbucks Café et le roman. Pourquoi ? Eh bien parce que « Starbuck » (là, sans le « S ») est le capitaine en second du navire, le directeur adjoint, juste derrière le ténébreux Achab.

Contrairement à ce que certains pensent, « Starbucks » (avec le « S » cette fois) n’est donc pas le navire en lui-même (qui s’appelle en fait Le Péquod, rapport à une tribu indienne) mais bel et bien un des personnages principaux du livre. « Monsieur Starbuck« . Un type qui garde sa tête sur les épaules quand son responsable direct, lui, la perd complètement. De même que Le Péquod ne possède pas une figure de proue en forme de sirène à deux queues, comme le logo de la franchise américaine. Non ! Moby Dick n’est pas juste bon à lire pour satisfaire sa curiosité de consommateur mondialisé, ou pour torturer nos lycéens. C’est avant tout un roman dense comme l’océan et profond comme la gorge d’un cachalot. Violent, anti-écolo, monstrueux et passionnant. C’est en vérité « un bien beau livre, une épopée de l’Amérique« , comme l’écrivait Nathaniel Hawthorne lors de la sortie du livre, en 1851.

L’anatomie d’une baleine

Moby Dick est avant tout une aventure que seul le 19ème siècle pouvait produire. Privé d’Internet et de télé, le pauvre public n’avait guère que les mots pour décrire une situation. Chose qui a presque totalement disparu aujourd’hui et qui explique partiellement la nullité de l’orthographe général.

Il s’agit donc de partir harponner le cachalot dans les mers du Sud pour en extraire l’huile et l’ambre gris dans le gore le plus pur ! Au milieu des requins et des morceaux de graisse, les pêcheurs éviscèrent le cadavre de la baleine pour en exploiter la moindre parcelle. Utilité ? Avant le pétrole, on utilisait l’huile de cachalot comme combustible aux quatre coins du monde. Les meilleurs morceaux étaient mêmes réservés au Roi, et la queue à la Reine. Une explication pour le logo Starbucks ? Peut-être cette sirène couronnée, symbole de la mer, qui tient une double queue de poisson.

Bourré de chapitres descriptifs sur la biologie des baleines, mais aussi de connotations religieuses (la baleine, ce fameux » Léviathan biblique » qui avala le prophète Jonas) et tribale, l’œuvre de Melville peut agacer par moment en raison de son rythme pesant et didactique. Il reste néanmoins le souffle littéraire, l’ambition de l’intrigue et le réalisme maritime. En refermant le livre, on se sent seul et faible. Une seule solution : prendre le large !